La licorne est la proie ultime de tout chasseur. C'est un animal si rare que les érudits la prennent parfois pour une légende, et son intelligence est réputée pour être similaire à celle des humains. Elles se cachent et jouent même des tours aux braconniers qui les prennent en chasse. Ces derniers peuvent se retrouvés guidés dans une partie de la forêt qui regorge de danger, ou dans des pièges qu'ils ont eux-même mis en place. Certains disent avoir poursuivi une licorne pendant des heures avant de la voir disparaître derrière un talus. L'instant d'après, la bête était visible en haut d'une colline, à des kilomètres de là, sa corne réfléchissant la lumière du soleil dans une ultime moquerie.
C'est cette corne, appelée "Alicorne" par les savants, qui en fait le rêve des chasseurs. On raconte qu'elle donne ses pouvoirs à l'animal (notamment son apparente capacité à créer des illusions pour tromper ses poursuivants), mais elle a d'autres propriétés. Broyée en une fine poudre, elle devient l'antidote ultime, capable de guérir tous les poisons et toutes les maladies, et on raconte aussi que simplement porter l'objet près de soi donne meilleure santé. Les rois et les empereurs les plus riches, capables de se payer un tel trésor, survivent à des maladies et des blessures qui auraient tué des gens ordinaires, vivent 10 à 20 ans de plus que le reste de leur cour, et meurent tous de vieillesse ... Ou d'assassinat. Car bien sûr, les personnes qui seraient prêtes à tuer pour une mettre la main sur une alicorne sont inombrables.
Déjà, la famille proche sombre souvent dans la jalousie et l'envie. Le petit frère qui se voit vieillir et décrêpir quand son aîné est en pleine forme. La fille qui a peur de mourir avant son père et de ne jamais profiter de l'héritage. La cupidité est un autre motivateur : réussir à vendre une corne sans avoir été égorgé avant, même à un prix bradé, représente assez d'argent pour faire vivre une famille entière dans l'opulence sur plusieurs générations. La peur et le désespoir suffisent aussi pour convaincre une personne condamnée par la maladie, ou le proche d'une telle personne, à chercher ce remède universel. Enfin, la simple gloire d'être membre de l'élite priviligiée des propriétaires d'alicorne peut être un motivateur. Les voleurs qui parviennent à récupérer une alicorne, généralement en assassinant son précédent propriétaire, ont beaucoup de chance d'être la cible, à leur tour, d'un meurtre. Il peut arriver parfois même qu'un individu parvienne à voler le trésor recherché pour être immédiatement abattu lorsqu'il se croit hors d'atteinte, car il était surveillé depuis le début par ses "collègues". Les cornes peuvent parfois passer par une demi-douzaine de mains en moins d'un mois, et leur trace devient difficile à suivre, mais les individus les plus déterminés à mettre la main dessus ne s'arrêtent pas pour autant et font de grandes enquêtes.
Le petit monde des Chercheurs d'alicorne (terme désignant uniquement les personnes qui cherchent une corne déjà extraite, à ne pas confondre avec les "chasseurs de licornes", c'est à dire les individus qui chassent la licorne vivante) est un monde de paranoïa où tout le monde se méfie de tout le monde. C'est un secteur d'activité étrange : certains chercheurs expérimentés ont développé des stratégies complexes et donnent même des conseils aux nouveaux chercheurs, mais n'ont jamais vu d'alicorne de leur vie. Si l'un d'entre eux avait atteint son objectif, il devrait disparaître au plus vite, car il serait la prochaine cible des chercheurs. On raconte que l'un d'entre eux, après avoir réussi à se procurer un sachet d'alicorne broyée, fit semblant de continuer ses recherches, pour donner l'impression qu'il n'avait rien trouvé et ne pas éveiller la méfiance. Son corps fut retrouvé décapité une semaine plus tard, et un de ses collègues avait disparu dans la nature. Les chercheurs d'alicorne sont des enquêteurs professionnels, et tôt ou tard, ils remonteront la piste d'une corne disparue.
C'est que ce petit monde est devenu très organisé. Chaque chercheur a sa propre archive personnelle, recueillant tous les indices rencontrés dans sa vie, avec des frises chronologiques indiquant les différents propriétaires d'une alicorne, des notes sur les autres chercheurs visant à remarquer un changement de comportement, ou même les dates de naissance des nobles de la région (pour s'assurer qu'aucun n'a l'air plus jeune qu'il ne devrait l'être). Si originellement, les chercheurs gardaient leurs archives pour eux, au fil des siècles, certains ont réalisés qu'ils pouvaient se faire plus d'argent en vendant des informations aux autres chercheurs plutôt qu'en espérant devenir un jour eux-même propriétaires d'une alicorne. Leurs collègues, même s'ils ne se privent pas pour acheter leurs tuyaux ou jeter un oeil à leurs journaux, méprisent ces "archivistes" (comme ils aiment s'appeler), car ils considèrent que la recherche est un art en soi, et que la recherche du profit ne devrait pas être le motivateur premier.
On parle parfois à tort de "guildes" des chercheurs, mais c'est un mythe, une légende colportée par les extérieurs au milieu qui ne comprennent pas comment des gens qui se méfient autant les uns des autres peuvent travailler de commun. Des témoins parlent de cérémonies mortuaires où même les assassins du défunt sont conviés pour honorer sa mémoire, ou de fêtes où les chercheurs célèbrent la chance d'un des leurs, qui a réussi à échapper à leurs poignards en partant avec une alicorne, comme s'il s'agissait d'un ami. Un tel mélange de manigances sans scrupules et et de rituels observés religieusement rappelle la stricte hiérarchie des guildes de voleurs, mais les deux groupes se sentent insultés d'un tel rapprochement (même s'ils échangent souvent des informations).
De nos jours, les chasseurs de licornes, malgré la difficulté à attraper leur proie, ont une vie plus simple que celle des brigands qui se revendiquent chercheurs d'alicornes. De plus, là où les chasseurs sont vus comme nobles et honorables, les chercheurs sont pris pour des fous doublés de malfrats. Mais ces derniers se moquent bien de ce que pensent les gens respectables. La fièvre de la recherche les as touché une fois et ne les as pas quitté. Qu'ils meurent de vieillesse sans jamais avoir atteint leur objectif, ou empoisonné par un collègue, ils sont fier de vivre comme des chercheurs, et de mourir comme des chercheurs.
IDÉES D'AVENTURES :
- Un chasseur de licorne est sur une piste qui s'avère prometteuse, mais à part d'être assassiné par des chercheurs sur le chemin du retour, une fois son alicorne en poche. Il engage les PJ comme mercenaires pour l'accompagner à la fois pendant la chasse, mais aussi comme escorte jusqu'à la capitale où il compte l'offrir à l'empereur.
- Les PJ, enquêtant peut-être sur une affaire de meurtre, ont besoin d'information détenue par un archiviste chercheur d'alicorne. Ils pourront payer le prix fort pour leurs questions, ou choisir d'aller espionner pour son compte un concurrent qui ne sort plus de chez lui depuis plusieurs jours. (Le concurrent peut être sur une piste importante, ou mort, selon vos préférences.)
- Après avoir été témoins d'un meurtre cérémoniel, pouvant laisser penser à l'oeuvre d'une secte, les PJ sont pourchassés par la garde, qui les prend pour des chercheurs d'alicornes, mais ils ont également l'impression d'être suivis. Une bonne partie du "milieu" des chercheurs les tient à l'oeil pour s'assurer qu'ils ne révèlent pas d'informations aux forces de l'ordre, mais aussi pour être sûr qu'ils ne sont pas eux même des chercheurs. S'ils les PJ leur donnent cette impression, ils risquent fort d'être capturés et torturés, dans l'espoir qu'ils aient des informations inédites.
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